Des hommes, des femmes, des enfants sont aujourd'hui pourchassés, traqués, empêchés de vivre. Ce sont les sans-papiers, fuyant misère et dictatures souvent au péril de leur vie, victimes de réseaux mafieux qui vivent de la fermeture de nos frontières. Leur seul tort est de vouloir vivre à toute force et construire un avenir meilleur pour leurs enfants.
Le gouvernement les transforme aujourd'hui en gibier et en boucs émissaires des maux de la société française. À l'arbitraire de la loi s'ajoute celui des pratiques administratives sous la pression d'une « politique du chiffre » ignorant toute humanité. Les drames deviennent quotidiens. Voir ses enfants arrêtés en classe comme appâts, en être séparés arbitrairement ; ne pouvoir se soigner décemment, se loger qu'entre des murs suintant la misère, parfois y laisser sa vie et celle de ses gosses ; se faire exploiter par des négriers sous l'oeil complaisant des pouvoirs publics ; avoir la peur au ventre à chaque mouvement, la rue devenant un espace d'insécurité légale : c'est la vie quotidienne de dizaines de milliers de personnes dans la France de 2005.
Toutes les déclarations martiales n'y changeront rien. Et les étrangers en situation régulière sont victimes du même ostracisme, associés insidieusement au terrorisme et à la délinquance. Puis les Français qui leur ressemblent subissent les mêmes avanies, les mêmes violences policières. Enfin tous les habitants de France sont fichés parce que simplement ils accueillent parents ou amis. Cette politique porteuse de désespoir, de haine et de xénophobie semble être tolérée même de ceux qui, par leur histoire ou leurs principes, devraient y être les plus opposés. Elle est indigne des principes qui fondent une démocratie, elle est le contraire de la France que nous aimons et de l'Europe que nous voulons.
Nous n'admettons plus que ces souffrances s'étalent dans nos villes, sur nos trottoirs ou dans nos écoles. Nous ne supportons plus que des enfants soient embastillés, séparés de leurs parents, expulsés de l'école. Nous sommes révulsés de voir que des familles ont brûlé parce que leurs logements étaient dangereux et qu'on ne voulait pas les reloger. Il est intolérable que celles et ceux qui portent assistance aux plus faibles soient à leur tour menacés. Ce sont nos libertés à tous qui, de proche en proche, sont aujourd'hui en danger.
Nous trahirions nos principes et nos consciences si nous restions silencieux. Nous savons que tout n'est pas simple et que nul ne détient de solutions magiques. Mais nous avons vu l'Espagne, l'Italie, la Grèce, le Portugal procéder à des régularisations massives sans être en butte à cette invasion dont tant de politiciens attisent le fantasme. Et la politique qui conduit notre pays - dans une logique qui est aussi celle, aussi irréaliste qu'insupportable, d'une Europe forteresse - à un tel mépris des droits les plus élémentaires de centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, n'est pas acceptable.
Nous refusons d'en être complices. Nous appelons, d'ores et déjà, à un moratoire contre toutes les expulsions. Nous en appelons à un large débat démocratique pour construire une autre politique fondée sur le respect des droits et libertés de tous et qui fasse de l'immigré non pas un objet de rejet mais un sujet de droit et de dignité.
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